Le vrai voyageur n'a pas de plan établi et n'a pas l'intention d'arriver...

15.3.11

Les paradigmes incommensurables

On serait tentée de parler de ce qui torture nos nuits et fatigue nos yeux pendant ces longues journées. L'attente du pire, qui vient inexorablement.
Ce qui fut oublié.
Suivez l'évolution de la situation au Japon] / Latest News updated at 18:21 UTC, Mar. 15

urgent mesures
should be
taken ...
at the fukushiwa Dai-ichi power plant
cool down the temperature...
on tuesday morning, a fire occured...
if the reactor can't be...
if people exposed to the radiations, it has health implications...

les liquidateurs sont de retour.
Depuis hier
    blocage du ashi shinbum [english] >> Aller sur facebook ? mélanger la mort à ce non-lieu de vie. Ce n'est pas possible. Ces symboliques là ne sont pas échangeables.
A woman cried after the bodies of her mother and 3-year-old…
Les images ne servent plus à rien. Il n'y a rien à voir pour le moment. 
Après. On montrera les corps irradiés. 

Dire. Quoi. Faire. Quoi. [ greffe osseuse, manifestation ] 
Quelque chose.
De concret. Un peu de béton pour en finir avec Fukushiwa.
Un peu de béton et 750 millions d'€ pour finir le sarcophage à Tchernobyl...histoire que cette zone demeure un hot spot touristique

Ne pas repenser à ces images terribles de jeunes enfants marchant dans les ruines d'Hiroshima, désamparés, perdus, choqués, rendus muets par cette vision apocalyptique de cette ville qui leur fut familière. Et maintenant, maintenant parlons de ceux qui ont su dire et parler longtemps avant

en 1973

de ce fameux modèle de développement japonais que la guerre, les Etats-Unis, l'occident, le capitalisme ont créé et dont le réacteur Dai-Ichi de Fukushiwa et tous ces petits frères et soeurs) sont les dignes héritiers.

Parlons de Kashima Paradise...Imaginer un montage impeccable, la voix off de Chris Marker qui sussure quelque chose qui pourrait s'apparenter à la vérité, des paysages infinis du Japon, ravagés par l'industrialisation.  

Il n'était pas question d'attendre, ni de réflechir. Il est temps d'exproprier les paysans sans terre de leurs rizières, de bénir les usines qui rejetteront leurs boues toxiques dans les flots et de construire un aéroport international à Narita.

A la vigoureuse politique de modernisation du pays, les paysans, étudiants, ouvriers et gauchistes disciplinés se couvrent le chef de casques, s'enterrent dans des galeries, construisent des barricades et repoussent la police armés de pieux acérés. Certains sont morts, d'autres sont partis grossir le flots des petites gens. Il fallait produire. Vite.
On peut voir Kashima Paradise. 
On peut voir
 
Minamata, les victimes et leur monde
Minamata, kanja-san to sono sekai
de la même époque...




On peut voir que 
Kazuya ne repond pas.

On peut lire
la gauche révolutionnaire au Japon de Bernard Béraud, paru au Seuil en 1970...
 
La conclusion est toujours la même : il n'y eut ni concertation, ni transparence, ni dédommagement, ni seconde chance pour ceux qui ne partageaient pas la politique du gouvernement japonais de l'époque. Produire, produire, produire...

Le cercle de ma main s'approche de mon oeil : 
je vois Hiroshima et Nagasaki.
Clignement d'oeil
Je vois 55 centrales nucléaires.
Clignement d'oeil
Je vois le peuple japonais laissé à lui meme 
contraint à « accepter l'inacceptable et supporter l'insupportable. »

et comment se terminait l'allocution radiophonique de l'empereur Hiro-Hito le 15 aout 1945,
le Gyokuon-Hôsô
Cultivez les chemins de la droiture ; 
nourrissez la noblesse d'esprit ; 
et travaillez avec résolution, 
de façon à pouvoir rehausser la gloire immanente de l'État impérial 
et vous maintenir à la pointe du progrès dans le monde. »

Comment ne pas
être
en colère ?